la fin de l'effet papillon

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Dossier: La fin de l'effet papillon

 Ce dossier a été inspiré d'un article paru dans "pour la science" N°283 de mai 2001.

L'effet papillon est bien connu des météorologues et du grand public, je rappelle dans un premier temps de quoi il s'agit, puis nous verrons pourquoi aujourd'hui on revient sur cette théorie et quelques exemples qui contredisent l'effet papillon et enfin nous verrons les perspectives possibles en terme de prévisions météo.

Petit rappel sur l'effet papillon

Les prévisions météo prennent leur véritable essor au début des années 60 quand les calculs numériques nous permirent grâce aux premiers ordinateurs de faire des calculs auparavant inaccessibles. Toutes les prévisions météo reposent sur la modélisation de l'atmosphère c'est à dire une sorte de simulation avec autant de paramètres que possibles et de leur appliquer les lois de la thermodynamique des fluides, domaine des Sciences physiques qui s'occupe de l'étude des fluides liquides ou gazeux donc. Cette simulation se fait en découpant l'atmosphère en cubes (chaque cube apportant son lot de paramètres initiaux) et de modéliser l'évolution de ces cubes à partir des positions initiales connues.

A cette époque, le météorologiste Edward Lorenz essaie alors de calculer avec quelques inconnues l'évolution future de tels systèmes. Il s'aperçoit rapidement qu'il lui est difficile de calculer avec précision une évolution à long terme (plusieurs jours) car la moindre perturbation initiale aboutit à une incertitude extrêmement grande et le système tend rapidement vers le chaos (désordre). Et cette sensibilité extrême croît de façon exponentielle avec le temps. On fit alors remarquer à E. Lorenz que si l'atmosphère était si sensible aux conditions initiales, le moindre battement d'aile de papillon en un point de la Terre suffirait à perturber suffisamment l'atmosphère pour produire 2 semaines plus tard une tornade en un point très éloigné. La prévision au delà de 15 jours serait toujours impossible car personne ne pourrait jamais connaître l'état de tous les battements d'aile de papillons de la Terre entière...

 

Du nouveau sur l'effet papillon

Les temps ont changé et les météorologues ont constaté depuis longtemps que les perturbations ne croissaient pas de façon exponentielle mais proportionnelle au temps. D'autre part les ordinateurs de l'époque de Lorenz ne lui permettaient pas de faire des calculs avec un trop grand nombre de paramètres à cause de la limitation des ordinateurs. Aujourd'hui, les météorologues utilisent parmi les plus grands calculateurs du monde et peuvent ainsi faire des modélisations avec un nombre considérablement plus grand de variables qu'avant. Et c'est là que réside la solution .

Si l'on considère uniquement quelques variables, par exemple quelques molécules placées dans une pièce, leur mouvement erratique et fortement chaotique ne nous permet pas de prédire avec précision leur position par exemple au delà d'un temps assez court. Mais si l'on considère toutes les molécules d'une pièce et que l'on s'intéresse à des moyennes statistiques et non pas des mesures précises, la théorie de Boltzmann prédit que l'on pourra savoir même à long terme certains paramètres, par exemple la température ou la pression ou le fait que les molécules occuperont tout l'espace disponible. On ne pourra donc jamais connaître avec précision l'état microscopique du système mais par contre les paramètres macroscopiques sont tout à fait prévisibles.

Ainsi, une modélisation lancée avec quelques variables uniquement, par exemple une centaine, réagit très fortement aux conditions initiales et évolue vers un état chaotique comme l'avait prédit Lorenz. Mais si l'on considère beaucoup plus de variables (100 000 par exemple), le système, bien que chaotique microscopiquement, tend vers des états stables et peu perturbés à l'échelle macroscopique même si l'on a des perturbations initiales. On peut donc garder des structures cohérentes, bien que perturbées, pendant un temps beaucoup plus long que les deux semaines prévues par Lorenz.

 

Quelques exemples de structures cohérentes

 Le premier exemple se trouve sur Terre au pôle sud avec les dépressions qui entourent le pôle sud, entre les 40° et 50° parallèles, zone où ne se situe aucun continent.

On observe distinctement ces grands tourbillons, dépressions, qui tournent autour du Pôle sud et qui subsistent pendant des temps très supérieurs à deux semaines

Un deuxième exemple très spectaculaire est la fameuse tâche de Jupiter, gigantesque tourbillon de 20 000 km de diamètre et que l'on connaissait déjà à l'époque de Galilée. La persistance de ce tourbillon est un magnifique cas de structure cohérente:

 

Perspectives météorologiques

Les calculs de Lorenz refaits avec un grand nombre de variables aboutissent le plus souvent à des structures organisées malgré des conditions initiales chaotiques. L'effet papillon ne fonctionne désormais plus que pour des conditions bien précises et rarement rencontrées. On a même étendu son action à d'autres domaines tels que la bourse, mais même dans ces domaines, il ne s'applique pas autant qu'on veut bien le laisser croire.

On peut donc s'attendre à pouvoir faire des prévisions au delà de deux semaines et plus précises à l'avenir. Il faudra cependant affiner le maillage atmosphérique (le découpage en cubes) c'est à dire bien connaître les conditions initiales et modéliser avec des ordinateurs plus puissants que ceux que nous possédons aujourd'hui, ces deux conditions n'étant que des limites technologiques bientôt vaincues.